Le conte de la Lune

par **Sieur Vrémaux** Ven 12 Juil - 11:21

Extrait d'un conte pour enfant tiré d'un recueil intitulé : Les histoires de la forêt, par Antoinin Vivecimes

En des temps très anciens, immémoriaux, vivait un homme, dans la force de l’âge, seul dans une maison toute cassée, au bout d’un chemin tout cassé. Cet homme était connu pour n’avoir jamais souris ni rit, pas même enfant. Il semblait ne pas avoir de cœur, ne pas connaître la joie.

Mais un jour vînt un vieux rétameur ambulant, portant dans ses sacs des merveilles ou de simples choses. Son âge avancé et sa fatigue des chemins le conduire jusqu’à la maison d’Aliax, l’homme qui jamais n’avait souris ni jamais n’avait ri. Frappant à sa porte, il lui proposa un pari. Dans ses sacs il lui trouverait quelque chose qui lui donnerait le sourire. Et en échange, il pourrait recevoir la maison.

Aliax accepta la proposition et finit par s’asseoir, pour laisser faire le vieux rétameur. Celui-ci ouvrir le premier de ses sacs. Le plus grand. Dans celui-ci, il tendit des billes de verre coloré qui à la lumière de sa lampe semblaient luire doucement, reflétant la lueur dans des myriades de couleurs différentes. Il tendit une petite poupée, belle comme un cœur, une toupie dont les dessins hypnotisaient lors qu’elle entrait en mouvement et enfin vieux pinceau en argent. Mais aucun des objets ne fit frémir le cœur d’Aliax.

Il ouvrit alors le second sac, plus petit que le premier, qui contenait des objets rares. Une montre couverte de gravure, un petit oiseau, peint avec tellement de talent qu’on penserait qu’il était vivant et allait chatonner et s’envoler. Il lui tendit une flûte dont le son était tellement doux que même les cœurs les plus noirs des cœurs en verseraient des larmes de mélancolie. Mais rien n’y faisait, et le rétameur commençait à s’inquiéter.

Il ouvrir alors le dernier et le plus petit des sacs. Ce dernier ne contenait que trois choses. Une petite boite capable de contenir un nom. Une paire de lunette et une toute petite bourse contenant des graines. La boite et les graines n’offrirent aucun plaisir à Aliax, mais quand il chaussa les lunettes, son cœur chavira. Levant les yeux vers le ciel, il vit enfin la lune se lever, sortant des brumes qu’était sa vue jusqu’alors.

- C’est ça que je veux rétameur ! Et ce dernier soupira, bien attristé de devoir abandonner un tel trésor de ces temps très ancien.
- Alors elles sont à toi. Et ta maison à moi, lui dit-il.
- Non, ce ne sont pas les lunettes que je veux vieux rétameur, mais ça ! Et Aliax pointa alors la lune du doigt.
- Mais la lune n’est à personne . . . personne ne peut l’attraper, répondit le rétameur.
- Alors tu n’as rien que je désire. Donne-moi tes sacs et va-t’en, tel était notre accord lui répondit Aliax.

Et le vieux rétameur abdiqua, il avait perdu. Quelques temps plus tard, après avoir explorés les trésors contenus dans les sac du rétameur, Aliax finit par partir, loin dans la forêt de Sombrelinceul. Très loin. Il abandonna tout et planta les graines dans une clairière. Là, il y passa trois jours et trois nuits, offrant sa vie aux graines pour faire naître le plus grand des arbres qui n’ait jamais existé. Quand ce fût fait, il monta tout en haut de la plus haute des branches et tendit sa main à la lune, toute proche, attirant son attention.

Et là, pendant trois nuits de plus, il lui ouvrit les secrets de son cœur, lui chanta ses louanges et lui conta mille poèmes. Il patienta en haut de l’arbre pendant deux jours complets, attendant que la Lune revienne au coucher du soleil. Et la lune finit par tomber amoureuse de l’homme qui s’offrait à elle. Mais . . . après avoir tant donner, il finit par dépérir de fatigue sur son arbre. Voyant la mort arriver, la lune lui offrit son nom, son vrai nom inscrit tout au fond de son cœur et l’enferma dans la petite boite que tenait Aliax, dans ses mains tendues, juste avant qu’il ne rende son dernier souffle.